
Rebel Galaxy Outlaw
Rusty s’accouda au bar et commanda son Whisky Tivoli, comme à son habitude. Il ne dut même pas ouvrir la bouche, il tapa juste avec deux doigts sur le comptoir. Il ne venait que trop souvent dans ce troquet à la manque et le robot-barman avait une mémoire infaillible. Le joueur d’harmonica lui aussi était là, dans son coin, à entonner encore et toujours le même air. Il ne s’en souvenait que trop bien, Rusty ne venait ici qu’après des actes manqués, ce qui arrivait un peu trop souvent ces derniers temps. La dernière chasse à la prime ne s’était pas trop bien déroulée, comme la précédente, et comme celle d’avant encore. Il faut quand même être désespéré pour activer son moteur supraluminique devant un astéroïde et ramener un corps sous forme de pulpe ne plaît pas trop aux autorités du secteur. Bref, encore une prime de perdue et avec la mafia locale au cul, la dette mettait du temps à être lavée, trop de temps peut-être…
Ce petit essai de ma main tente de décrire un genre que j’affectionne particulièrement : le Space Western. Pour la lecture de ce test, je vous propose d’ajouter une dimension supplémentaire en mettant ceci en bruit de fond.
Vous me connaissez depuis un moment maintenant et vous savez désormais que j’apprécie l’univers spatial, mais si on vient à me parler du Space Western, mon cœur s’emballe comme une pléthore de papillons dans une prairie au soleil couchant, autrement dit : « Oh oui, encore ». Dans ce genre bien particulier de la SF, nous pouvons retrouver des noms très connus du petit écran comme Cowboy Bebop ou encore Firefly. L’espace y est sale, les vaisseaux rouillés et tous les personnages traînent leur fardeau comme si l’univers n’était peuplé que par mille et un spectres, ceux d’un passé perdu qui, malgré tous les efforts des personnages, ne reviendra jamais.
- Cowboy Bebop, une série chaudement recommandée
Rebel Galaxy Outlaw va s’insérer parfaitement dans ce genre, de par sa musique, son ambiance et son univers. Le jeu est une préquelle de Rebel Galaxy qui nous permettait de piloter un vaisseau capital dans une vue à la troisième personne en 3D mais où les mouvements s’effectuent sur l’axe des X en 2D. Cela peut sembler étrange mais cela fonctionne plutôt bien. Pour cette préquelle, les studios Double Damage prennent cette fois le parti de l’immersion avec des mouvements libres, une vue libre entre le cockpit ou vue troisième personne.
Hop, hop, on embarque dans notre vaisseau Sonora flambant neuf et on décolle à la recherche de la prochaine prime…
In a galaxy, far far away…
Comme précisé ci-dessus, Rebel Galaxy Outlaw est une préquelle du jeu Rebel Galaxy et reprend les grandes lignes directrices (si pas toutes ?) de son parent historique. Notre avatar de jeu est Juno Markev, ancienne contrebandière s’étant rangée et dont le meurtre d’un proche la force à retomber dans le grand bain de l’action virevoltante aux commandes de son vaisseau. Contrairement au premier jeu de la licence, nous allons ici pouvoir naviguer dans toutes les directions possibles que nous offre enfin son arrivée en « vraie » 3D avec en prime une vue cockpit et une vue « derrière le vaisseau ». Si la vue du cockpit a le mérite d’exister pour le simple fait de se dire que c’est très bien pour l’immersion, dans les faits nous allons le plus souvent utiliser la vue à la troisième personne qui nous donnera une meilleure vue d’ensemble de ce qui nous entoure et surtout de la beauté des décors environnants. Cette fameuse vue cockpit aura souvent le malheur de cloisonner nos angles de vision plutôt que de donner une réelle intensité au combat. L’intensité viendra de la seconde vue où nous pourrons vraiment ressentir la maltraitance que certains ennemis pourront nous infliger.
- Une station Casino, la classe à Vegas
Les combats sont dynamiques et il faudra souvent user de tactique car nos assaillants arrivent parfois à plusieurs, voire même accompagnés d’un vaisseau capital des plus solide, et de ce fait il faudra apprendre comment résister aux techniques dites de « hit and run » de nos nouveaux meilleurs ennemis. Commençons par les vues radars disponibles qui vous diront où se trouve l’ennemi le plus proche mais surtout s’il est en approche ou s’il s’éloigne, afin de choisir la cible la plus adéquate à pourchasser. Ajoutons à cela la bande son juste géniale issue de différentes radios dispos dans le jeu (allant du classique au bon vieux rock crasseux des rednecks), et vous aurez un jeu de dogfight juste jouissif entre les mains.
Cependant, bien que les radars soient bien utiles, si votre vaisseau est une espèce de vieille bouse anémique – comme le vaisseau de base, le Platypus, qui se trouve être une brique volante, littéralement -, vous n’irez pas loin. Pour progresser, vous allez pouvoir choisir de nouveaux vaisseaux, les acheter et les équiper comme il se doit. Cela va du vaisseau multifonction comme le Sonora qui est bon dans un peu tous les rôles mais n’excelle en rien, en passant par le Coyote qui est une véritable machine à tuer rapide mais fragile, jusqu’au Durston qui se trouve être une espèce de grosse coquille ultra mastoque faite pour le transport de fret mais d’une lenteur exécrable, qui vous tiendra les miches au chaud pour peu que vous ayez quand même de bonnes armes.
- Cette vue me fera toujours rêver
- Les portails entre les secteurs, comme de gros canons stellaires
- Pan dans les dents !
Sans transition, les armes, parlons-en ! Si vous êtes amateur de grosses pétoires spatiales, vous serez ici comblé ! Nous aurons un véritable arsenal à disposition : des armes à énergie, des autocanons, des lance-missiles. Bref, de quoi bien s’éclater façon Schwarzie dans la jungle. Chaque vaisseau aura un nombre de port d’armes variables, il vous faudra trouver la combinaison d’armes qui pourra vous garder en vie le plus longtemps possible. Mais comme le disait un sage que je n’ai pas connu : « les armes cela ne fait pas tout », et nos vaisseaux peuvent recevoir plus d’options que quelques armes. Ces améliorations sont vraiment diverses et vont pouvoir pousser la versatilité de votre monture en fonction de vos objectifs ou de votre façon de jouer. Les vaisseaux peuvent recevoir des centrales énergétiques, boucliers, plaques d’armures, robots de réparation, scanners à minerai, etc. etc.
Il faut savoir que si vous n’améliorez pas tout au fur et à mesure de votre aventure, vos fins de parties arriveront de nombreuses fois et ce, très vite. Il sera important de garder à l’œil votre jauge d’énergie car, par exemple, les armes à énergie vont vous bouffer des blindes de puissance, tout comme le booster d’accélération. Les autocanons eux ne nécessitent pas de courant, mais doivent se recharger après un certain nombre de rafales. Vous aurez compris qu’en pleine bataille, l’attention devra être portée sur tout ce qui fera votre survie si vous désirez l’emporter sans trop de casse (qui plus est, réparer le vaisseau peut coûter une blinde).
- Le coyote, violent mais fragile, comme David Douillet
- Voici les différents et nombreux systèmes à visiter
- OUI, CECI EST NOTRE STATIOOON
Pour vous faire de l’argent, vous n’aurez pas d’autre choix que d’enchaîner les missions secondaires. Ces dernières sont très variées : des missions pour la guilde des marchands (très profitables si on a de la patience et assez de place dans notre soute de fret) et des missions pour la guilde des mercenaires qui consisteront à aller mettre une branlée au méchant du secteur, à forcer un blocus d’une planète pour lui livrer quelque chose d’important, à escorter un convoi de camionneurs de l’espace ou encore à aller secourir une âme en perdition près de l’une des nombreuses balises de détresse qui résonneront lors de vos aventures. Il faut savoir que lesdites balises sont parfois simplement des guet-apens ourdis par une bande locale ayant pour but de mettre la main sur vos denrées. Venir en aide aux locaux vous vaudra d’être mieux vu par les autorités locales et de ce fait moins souvent contrôlé par les milices en place (parfait si vous faites parfois un peu de transport de matériel douteux), mais si votre morale est aussi bancale qu’une décision d’un pays de quitter la zone européenne, vous pourrez aussi vous joindre aux bandes du coin, attaquer des convois commerciaux ou faire de la contrebande à foison. Comme dirait l’autre, il n’y a pas de petit profit ! Moi, je me la joue parangon en tout temps, chacun son kiff.
Les missions seront principalement données dans les différentes stations qui peuplent les nombreux systèmes planétaires à disposition et que nous aurons à explorer. Certaines stations sont neutres, d’autres nécessiteront d’avoir une mauvaise réputation pour pouvoir s’y poser. Les systèmes stellaires sont d’un niveau de difficulté progressif et nous en revenons au fait de bien devoir s’équiper avant de pouvoir y poser le pied.
- La carte d’un système qui vous indiquera les planètes ou stations à disposition
- Le radar de combat vous indique les cibles et leur cargaison
- Il y a un petit côté Endor, non ?
La mission principale, elle, consistera essentiellement à trouver qui (et où) est celui qui se cache derrière le décès prématuré de notre être proche. Notre mari plus précisément. Nous apprendrons au fil de notre aventure que Juno Markev a déjà un lourd passé derrière elle, liée à des bandes de criminels notoires ou autres barons de la pègre. Nous aurons à faire des choix parfois importants pour la suite de notre aventure comme par exemple décider de suivre notre morale (ou non) en laissant la vie sauve à une bande de policiers spatiaux qui n’ont plus de défense après une brève incartade.
Enfin, pour finir le côté presque dithyrambique de ce test, les graphismes. Avec un petit aspect cartoon (très légèrement j’entends), il n’y a rien à redire sincèrement, les stations ont un côté pastel en extérieur, mais sont aussi crasseuses à l’intérieur qu’une toilette de festival médiéval pour certaines. Les planètes elles sont superbes si on s’en tient au peu que l’on voit, c’est-à-dire un peu de sol au moment de se poser avant de nous retrouver le nez dans un nouvel environnement d’intérieur. Les vaisseaux qui vont vous entourer sont vraiment divers et variés, ces derniers vont même jusqu’à vous contacter par radio pour savoir si tout se passe bien. Cet univers transpire de vie malgré un vaste espace. Je vous ai déjà parlé de la bande son ? Il me semble, mais je dois à nouveau en remettre une couche tellement elle s’inscrit parfaitement dans l’univers, en pleine cohérence avec le style du Space Western : ces airs musclés lors des combats ou le léger souffle dans un harmonica sur une station. J’en frémis.
- Le cockpit à un côté « Vintage » avec les écrans cathodiques
- Le bar est le lieu de passage obligé pour les petits renseignements indiscrets
- Le gars sent le pognon à 20 parsecs
This is the Grinder, your favorite radio in the universe
« The Grinder », l’une des nombreuses radios disponibles à l’écoute dans le jeu, peut être une espèce de pied de nez au principal reproche que des joueurs peu habitués pourraient faire au titre. En effet, Rebel Galaxy Outlaw, tout comme son prédécesseur, repose sa mécanique de jeu principalement sur le « Grinding », autrement dit le fait de devoir recommencer souvent si pas tout le temps les mêmes tâches dans un jeu pour avoir une quelconque progression, jusqu’à en perdre l’envie de jouer. Si vous désirez avancer dans Rebel Galaxy, il vous faudra vous équiper. Pour vous équiper il vous faudra de la monnaie locale. Et pour choper de la maille, il faut se frapper en boucle des missions secondaires de transport de fret, de soutien et d’escorte.
Pour les joueurs qui ne sont pas adeptes de cela, je ne pense pas que Rebel Galaxy Outlaw pourrait convenir car cela nécessite un minimum d’investissement, surtout pour les missions de transport de fret qui vous demandent de mettre par vous-même la main sur 18 unités de « j’sais pas quoi » et de le livrer « j’sais pas où ». Pour savoir où sont produits les trucs, vous allez vous référer à votre carte stellaire qui vous indique les besoins et les productions de chaque planète. Une fois votre cible repérée, vous allez devoir vous y pointer (avec le risque inhérent de piraterie qui vous pend au nez) et aller voir si la planète en question dispose d’assez de stock pour votre mission, sinon il faudra continuer à chercher ! La patience du joueur est mise à rude épreuve car si en plus nous subissons plusieurs attaques de pirates, il faudra réparer notre petite monture. Nous aurons parfois l’impression de perdre plus d’argent que d’en gagner.
- La roue des options en cours de partie
- Vers l’infini et au delà de la planète du coin
- On peut équiper notre vaisseau selon nos désirs
Ceci est la faiblesse de Rebel Galaxy Outlaw, mais sans doute aussi sa plus grande force. En gardant le même principe de Grinding que dans son jeu précédent, le studio Double Damage s’assure de fédérer une communauté fan de son univers et d’en renforcer le lien avec la licence qui est devenue appréciée par des joueurs qui rejettent une sorte de « casualisation ». Cependant, par là même, le jeu tourne le dos aux joueurs qui auraient pu apprécier l’univers sans désirer subir une sorte d’élitisme forcé par le studio. Une pièce, deux faces, un jeu.
Note
15/20
Avec Rebel Galaxy Outlaw, Double Damage Studio nous propose de nous replonger dans son univers introduit avec Rebel Galaxy premier du nom. Cependant, Outlaw va s’adresser à une frange bien spécifique de joueurs, appréciant s’investir pleinement dans l’univers et acceptant le contrat du Grinding, qui pourrait repousser comme la peste et le choléra les joueurs facilement blasés par une licence ou une mécanique de gameplay que d’aucuns pourraient considérer comme paresseuse. Dommage car Double Damage aurait pu s’ouvrir davantage plutôt que de capitaliser sur sa fan-base existante. Pourtant, le titre vaut largement la peine d’être découvert et de s’y plonger pleinement.
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