« Voici le meilleur planning de sortie jamais présenté dans l’histoire de la Xbox ! ». Ce n’est pas Press-Start qui le dit mais Phil Spencer, le responsable de la division Xbox de Microsoft sur une scène de l’E3. Comment lui donner tort… ou raison ?

Il y a d’abord ces trois jeux maison qui devaient asseoir le capital sympathie auprès de la communauté Xbox : Halo 5, Forza Motorsport 6 et Gears of War 4. Trois jeux aux qualités probablement indéniables et très soignés. Trois jeux souffrant du même syndrome : la continuité tranquille.

Halo 5 lance la conférence sous l’angle de la prévisibilité. Les teintes mauves sont de retour. Les merveilleux événements périphériques aussi, notamment des vaisseaux au décollage. La vidéo de gameplay présente une action rythmée et lisible dans des environnements assez ouverts. 343 Industries a déjà prouvé sa maîtrise en la matière. Et c’est précisément le problème, Halo 5 ne semble pas terrasser Halo 4, sa technique ne surclassant pas non plus celle de son (déjà superbe) prédécesseur sur Xbox 360. Reste à voir si les possibilités de coopération et les commandes de l’escouade apporteront de nouvelles idées.

Forza Motorsport 6 n’a pas l’honnêteté de scinder clairement les vidéos précalculées et les séquences réelles de jeu. Impossible donc de se prononcer sur l’écart graphique avec le précédent épisode. Néanmoins, les deux titres tournent sur la même machine et le court délai de développement entre eux ne laisse pas supposer une maîtrise du support nettement meilleure. Dans ces conditions, il faut plutôt s’attendre à un Forza 5 avec des effets météo.

Annoncé juste après le lifiting du premier de la série, Gears of War 4 ne fait pas non plus de miracles. Le niveau présenté pousse plus loin le réalisme des décors et fait souffler le vent dans les arbres. C’est joli, ça bouge bien, mais ça n’invente rien, rien du tout. Après trois épisodes et demi, on espère une réelle évolution de gameplay qui n’est pas apparue ici.

Les trois poids lourds de la conférence butent donc tous sur la même pierre. Même s’ils seront assurément des jeux de qualité, un peu de fraîcheur leur ferait du bien.

Rise of the Tomb Raider, en voilà un autre qui ronronne et risque l’autoparodie. La PS4 aura son Uncharted, la Xbox One l’aura aussi. Lara fait de la grimpette suicide sur les parois enneigées en s’accrochant à la vie et à sa chance insolente. Le spectacle est total mais, même avec le développeur manette en main, on ignore toujours quand le jeu avance tout seul et quand il demande une légère intervention du joueur. Outre sa qualité graphique (pas forcément supérieure au reboot), Rise of the Tomb Raider conserve un plaisir sadique à malmener Lara. Ca va encore être la fête de Miss Croft et des animaux à chasser.

Soyons mauvaise langue, Rare a tellement somnolé durant la génération précédente que le studio pouvait, lui, difficilement se répéter. Son Sea of Thieves, l’une des surprises de la conférence, ne ressemble à rien de chez Rare. Après un Nuts and Bolts très éloigné de ce que les fans de Banjo attendaient, Rare joue encore la carte danger avec ce qui ressemble à un jeu de piraterie multijoueur. Les graphismes sont très colorés et lumineux, le ton est léger et le goût de l’aventure paraît savoureux. Et cette mer ! L’eau portant les bateaux s’anime avec une grâce inouïe ; elle vaut le coup d’œil à elle seule. Comme il s’agirait du « jeu le plus ambitieux jamais créé par Rare, et de loin », dixit un responsable de la boîte, on a forcément l’eau à la bouche.

Rare surprend aussi en proposant une compilation de ses meilleurs jeux en boîte. 30 dollars pour 30 grands jeux : Perfect Dark, les Banjo, Conker, Battletoads, RC Pro-Am et même du très rétro sur ZX Spectrum. Un excellent casting qui rendra hommage à ce studio mythique. Phil Spencer ne s’y trompe pas, il enfile un T-shirt au logo Rare pour clôturer la conférence.

Mais avant le clap de fin, Phil a présenté quelques cartouches matérielles ou logicielles. Tout d’abord, l’inattendue et inespérée rétrocompatibilité de la Xbox One avec les jeux Xbox 360 en téléchargement ou sur disque, gratuitement. Une mise à jour de la console rendra cet « exploit » possible et coupera l’herbe sous le pied aux envies de réédition super hyper HD. Ensuite, une formule d’early access ravira les plus impatients et permettra d’essayer gratuitement des titres encore en développement – vive les démos ! Enfin, Microsoft mise sur la réalité virtuelle dans le cadre d’un partenariat avec Oculus Rift associé à un système nébuleux de streaming via un PC, mais aussi au moyen d’un casque à hologrammes. Avec l’accessoire HoloLens sur la tête, le joueur pourra projeter l’affichage sur n’importe quelle surface, verticale ou horizontale. La présentation de Minecraft prenant vie sur une table de salon fait son petit effet, en particulier grâce à la perspective dans le style god game. Encore un nouveau souffle pour Minecraft ?

Parmi les annonces un peu moins marquantes, Fable Legends ne parvient pas encore à enthousiasmer. Souhaitons bonne chance à la bêta, bientôt accessible, de cette déclinaison multijoueur. Même s’il a pour lui son style marqué mi-Guacamelee mi-Team Fortress, Gigantic attendra aussi avant de convaincre complètement le public. L’action de ce jeu de tir compétitif est certes attirante, spécialement lorsque le joueur invoque un gardien géant à la manière de Titanfall. Dans la catégorie « à tenir à l’œil », Recore se démarque encore par sa qualité de présentation et surtout par ses noms au générique : rien de moins que l’Inafune de Capcom et d’anciens collaborateurs associés au développement de Metroid Prime. En une bande-annonce sans gameplay, Recore a montré son potentiel sur le plan artistique et émotionnel. L’héroïne (grosso modo du genre Jade de Beyond Good & Evil) et le joueur lieront probablement une amitié avec cette entité lumineuse possédant et animant divers robots, dont un chien.

Les indés, quant à eux, se sentent bien chez Microsoft. Plus les images défilent, plus Cuphead sent la future sensation du jeu de plateformes. Une nouvelle définition du dessin animé interactif ! Les autres vidéos de présentation n’avaient hélas que la peau sur les os : pas ou peu de gameplay, et parfois même aucun indice sur le type de jeu. Pas de quoi s’extasier donc encore à ce stade, sauf peut-être pour Beyond Eyes, un poil plus démonstratif. Dans des dessins au style crayonné, une jeune fille se déplace en dévoilant le décor au fil de ses pas. Avant de connaître le principe du jeu, Beyond Eyes montre déjà de belles choses. Sinon, Elite Dangerous, ça vous dit quelque chose ?

Rien ne sert d’évoquer ici les Fallout 4, The Division et Dark Souls 3, la conférence Microsoft n’était pas l’endroit idéal pour les présenter. Pour le reste, la marque Xbox, désormais étroitement liée à Windows, a proposé un bon équilibre entre les blockbusters sans surprise et les titres intrigants, souvent exclusifs. Il y aura de quoi faire sur Xbox One, c’est sûr, en y ajoutant encore le catalogue 360 maintenant compatible.